Contre toute attente, l’instance présidée par le juge Luc Morin dans le recours intenté contre Ville de Laval dans le dossier visant la construction d’un complexe de production cinématographique, dans Saint-François, s’est transformée en conférence de gestion, le 6 décembre dernier au palais de justice.
Cette première journée d’audience a été à l’image de cette saga entourant le controversé projet du promoteur Michel Trudel, qui défraie la manchette depuis deux ans et demi et dont les innombrables rebondissements sont dignes d’un scénario hollywoodien.
Imbroglio judiciaire
Le juge de la Cour supérieure était saisi non pas d’une ni deux ni trois ni quatre, mais bien cinq requêtes.
Outre les demandes en déclaration d’abus de procédure et en rejet de la demande de pourvoi modifiée déposées par la défenderesse, la Ville de Laval, et la mise en cause, Trudel Studios inc., le magistrat devait trancher une requête en cassation de citation à comparaître, une demande en radiation d’allégations et une dernière requête pour permission de modifier la demande de pourvoi en contrôle judiciaire en nullité de règlements et d’injonction interlocutoire. Celles-ci étaient formulées par les demandeurs, à savoir la Coalition mobilisations citoyennes environnementales de Laval (CMCEL) et quatre citoyens de Saint-François.
«La journée va être moins productive qu’on l’aurait souhaité, a fini par reconnaître le juge avant de suspendre l’audience pour l’heure du lunch. Le Tribunal n’est pas équipé pour trancher les requêtes.»
Crever l’abcès
En matinée, le procureur de Michel Trudel, Me Steve Cardin, réclamait à la Cour qu’elle rejette la procédure pour cause d’inhabilité du cabinet De Grandpré Chait (DGC) à représenter les demandeurs dans cette affaire.
Me Cardin faisait valoir qu’en mai 2023, dans le cadre du projet en litige, le cabinet DGC avait agi pour le Groupe Mach alors que celui-ci était, à l’époque, partenaire de Trudel Studios pour le volet construction. Le fait que le cabinet eut accès à des renseignements privilégiés et confidentiels dans ce dossier le discrédite, allègue Me Cardin.
Ce que dément dans une déclaration assermentée Me Marc Beauchemin, avocat associé chez DGC dont les services avaient été retenus par Groupe Mach pour une opinion juridique qui, dit-il, ne portait pas sur la légalité du processus de modification réglementaire alors envisagé par la Ville de Laval et qui fait aujourd’hui l’objet d’une contestation de la part des demandeurs représentés par ses associés.
«[…] il faut crever cet abcès-là», a déclaré le juge Morin en évoquant une épée de Damoclès «au-dessus des têtes de tout ce monde qui est ici dans la salle».
Et seul un «interrogatoire musclé» de Me Beauchemin par le procureur de Michel Trudel permettra d’y arriver, a laissé entendre le magistrat, ce à quoi ne s’est pas objecté Me Jonathan Fecteau, représentant les demandeurs.
Au retour du lunch, après avoir pris connaissance de documents ex parte produits par Me Cardin qui l’ont conforté dans sa réflexion, le juge a indiqué aux parties qu’il était déjà à rédiger des ordonnances pour dénouer l’impasse.
«On va crever l’abcès, je vous le promets», leur a-t-il lancé après avoir transformé l’instance en audience de gestion.
Puis, avant de prononcer ses ordonnances, le juge Morin, qui avait soulevé en fin de matinée «toute la tension» entre les procureurs, a formulé le souhait «que les échanges entre les parties retrouvent une certaine sérénité» pour le plus grand bénéfice «d’une saine administration de la justice».
Demande en inhabilité
Le Tribunal a ainsi ordonné à la mise en cause, Trudel Studios inc., et/ou à la défenderesse, Ville de Laval, de produire une demande en déclaration d’inhabilité à l’encontre de DGC, conformément à l’article 193 du Code de procédure civile, au plus tard le vendredi 20 décembre, à défaut de quoi seront radiés les 15 allégués de la demande en rejet de Trudel Studios visant l’inhabilité du cabinet à agir dans le dossier en litige.
En clair, la Cour est d’avis que ces allégués ne sauraient servir de fondement à une demande de rejet et une condamnation d’abus de procédure envers les demandeurs.
L’audition de cette demande en inhabilité a été fixée pour le vendredi 21 février 2025 et devra se conclure le jour même, le cas échéant.
Interrogatoire
Le Tribunal a également ordonné que l’interrogatoire de Me Marc Beauchemin par la mise en cause et/ou la partie défenderesse se tienne au plus tard le mardi 21 janvier 2025.
À cet égard, les procureurs des demandeurs ont été sommés de fournir copie de tous les documents échangés, incluant opinions, notes de service et mémos, et de toutes communications reçues de Groupe Mach, ses professionnels et consultants en lien avec le Projet aux procureurs de la mise en cause et de la défenderesse, et ce, au plus tard le vendredi 13 décembre, 17h.
Report sine die
Quant aux autres requêtes, elles ont été remises sans que ne soit fixée une date d’audience.
Parmi celles-ci, la requête des demandeurs datée du 13 novembre dernier à l’effet d’amender leur demande de pourvoi en contrôle judiciaire et d’injonction interlocutoire à laquelle Trudel Studios s’est objecté. La version remodifiée fait notamment état d’un rapport d’évaluation commandé cet automne à la firme GRH Évaluateurs Agréés inc., qui établit à 56 150 000 $ la valeur marchande du terrain que M. Trudel a récemment acquis au coût de 32 101 000 $ de la Ville afin d’y construire son projet, soit un écart favorable au promoteur de 24 M$.
Rappelons que le prix de vente avait été fixée selon la valeur marchande établie en date du 6 avril 2022 par la firme d’évaluateurs immobiliers mandatée par l’administration Boyer, à savoir Paris, Ladouceur & Associés.
Situé à l’est de l’autoroute 25, le terrain en question couvre une superficie équivalant à 30 terrains de soccer en bordure de l’avenue Marcel-Villeneuve, jouxtant la zone agricole permanente.
Le projet Trudel Studios est évalué à quelque 200 M$.
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