Alors que de nombreuses études montrent que les coronavirus humains, dont le SRAS-CoV-2 causant la COVID-19, semblent s’attaquer aux neurones et au système nerveux (SN) chez des populations vulnérables, une recherche menée à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) a permis de trouver un moyen de prévenir la propagation de l’infection à l’intérieur du SN central.
L’étude, dirigée par le professeur Pierre Talbot et son associé de recherche Marc Desforges, maintenant à l’emploi du laboratoire de virologie du CHU-Sainte-Justine, vient d’ailleurs d’être publiée dans le Journal of Virology, la revue scientifique de l’American Society for Microbiology.
Immunité antivirale
«L’équipe de recherche est la première à démontrer un lien direct entre la neurovirulence, le clivage de la protéine S par des protéases cellulaires et l’immunité innée. Cette immunité antivirale découle de la production d’interférons, des protéines de première ligne qui aident à détecter rapidement la présence d’un virus», indique l’INRS dans un communiqué publié le 23 mars.
Précisons ici que la protéine S – désignant spicule ou spike en anglais – forme les pointes de la couronne du coronavirus et est responsable de la maladie COVID-19, servant de point d’entrée du virus dans les cellules humaines.
Le professeur Talbot, qui étudie les coronavirus depuis près de 40 ans, explique: «En utilisant un coronavirus du rhume, similaire au SRAS-CoV-2, nous avons démontré que le clivage de la protéine S et l’interféron pouvaient en empêcher la propagation au cerveau et dans la moelle épinière chez la souris.»
Deux voies thérapeutiques
Selon Marc Desforges, qui a oeuvré 16 ans à titre d’associé de recherche au Centre Armand-Frappier Santé Biotechnologie, à Laval, le clivage de la protéine S par différentes protéases cellulaires est primordial pour que ces virus puissent infecter efficacement les cellules et se propager dans divers organes et systèmes du corps, dont le système nerveux central (SNC).
«Nos résultats démontrent que l’interféron produit par différentes cellules, dont les neurones olfactifs et les cellules qui produisent le liquide céphalo-rachidien (LCR) dans le cerveau, pourrait moduler ce clivage. Ainsi, il pourrait limiter, de façon importante, la propagation virale dans le SNC et la gravité de la maladie associée», affirme-t-il.
Réunis, ces résultats mettent en évidence deux cibles antivirales potentielles: le clivage de la protéine S et l’immunité innée efficace liée à l’interféron, mentionne l’Institut de recherche.
«La compréhension des mécanismes d’infection et de propagation virale dans les cellules neuronales est essentielle pour mieux concevoir des stratégies thérapeutiques, précise le chercheur et spécialistes des maladies neurologiques virales, Pierre Talbot. C’est d’autant plus important pour les populations vulnérables comme les personnes âgées et les personnes immunodéprimées.»
Autre publication scientifique
Cette découverte, qui ouvre la porte à de nouvelles voies thérapeutiques, a été soutenue financièrement par des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC).
Rappelons qu’il y a un peu plus d’un an, en janvier 2020, les travaux de Pierre Talbot et de son équipe avaient également fait l’objet d’une publication dans la revue scientifique Viruses. On y apprenait alors que la famille des coronavirus humains et d’autres virus respiratoires pouvaient atteindre le système nerveux central et s’attaquer aux neurones.