Au deuxième trimestre de l’année en cours, on estimait à 715 le nombre de postes vacants dans le secteur manufacturier lavallois.
Cette situation affecte plus sévèrement le secteur de la fabrication d’aliments, qui affiche à lui-seul quelque 140 postes à pourvoir, soit 20 % de tous les postes inoccupés.
Ces chiffres émanant de la plus récente enquête de Statistiques Canada révèlent une légère augmentation en comparaison du premier trimestre, où 695 travailleurs manquaient déjà à l’appel.
Toujours selon l’agence fédérale, à 4,2 %, le taux de postes vacants pour ce secteur d’activité à Laval demeure quelque peu inférieur à celui de l’ensemble du Québec, qui se chiffre à 4,6 %. Selon la bonne vieille règle de trois, on recenserait sur le territoire lavallois un peu plus de 17 000 emplois manufacturiers.
Pertes énormes
Cette pénurie de main-d’œuvre est généralisée à travers le Québec, si l’on s’en remet au récent sondage mené par Manufacturiers et Exportateurs du Québec (MEQ) selon lequel 98 % des membres sondés sont à court de personnel.
La présidente-directrice générale, Véronique Proulx, évalue à sept milliards de dollars les pertes subies l’an dernier en raison de ce manque de travailleurs.
Aux 4 G$ en valeur de contrats refusés s’ajoutent 3 autres milliards en projets d’investissement reportés.
«Force est de constater que la pénurie de main-d’œuvre, c’est aussi un frein à l’investissement, indique-t-elle en entrevue au Courrier Laval le 25 septembre. Avant d’investir, les chefs d’entreprise se disent : »Est-ce que je vais avoir le personnel nécessaire pour faire ma transformation numérique et les bonnes compétences pour travailler sur ma nouvelle ligne automatisée »».
PME durement touchées
Si le nombre de postes vacants a diminué au cours de la dernière année, passant de 30 à 25 000 pour l’ensemble du Québec, c’est surtout la grande entreprise qui en a bénéficié, observe Mme Proulx. «Les grands donneurs d’ordre offrent de meilleurs conditions, donc arrivent à mieux attirer et retenir les travailleurs. Les PME de 100-150 employés n’ont pas les mêmes moyens, les mêmes ressources ni la même expertise», dit-elle en soulignant que les manufacturiers québécois doivent de plus en plus se tourner vers l’étranger pour recruter. «Faire venir un travailleur étranger temporaire coûte entre 12 et 15 000 $», ce qui rend l’exercice hors de portée la majorité des PME.
Seuils d’immigration
À la mi-septembre, dans le cadre des consultations pluriannuelles sur l’immigration 2024-2027, Manufacturiers Exportateurs du Québec (MEQ) exhortait le gouvernement Legault à hausser les seuils d’immigration à 90 000 nouveaux arrivants par année, et ce, dès l’an prochain.
Actuellement, le Québec accueille annuellement 50 000 immigrants permanents, seuil que le gouvernement propose de porter à 60 000 en 2027.
Les défis que pose la main-d’oeuvre ne feront qu’augmenter avec «les départs à la retraite qui se feront nombreux dans les années à venir», fait valoir la p.-d.g. qui voit en l’immigration «un levier central pour diminuer l’impact de la pénurie.
À cet égard, elle réitère l’importance d’une meilleure adéquation de la politique migratoire avec les besoins réels des entreprises et des manufacturiers. «On a besoin de soudeurs, électromécaniciens, techniciens en génie mécanique», énumère au passage celle qui demande à Québec de prioriser les emplois manufacturiers dans son Plan d’action sur la main-d’œuvre.
La pénurie de travailleurs demeure un sérieux obstacle à la compétitivité du secteur manufacturier et le plus grand frein à la croissance, termine Véronique Proulx.
L’industrie manufacturière représente 12,6 % du produit intérieur brut (PIB) québécois. En 2022, les ventes globales s’élevaient à 213 G$, comptant pour 86,8 % de nos exportations.