De 2001 à 2016, la population immigrante lavalloise a augmenté de 123%. Les enfants de ces nouveaux arrivants grandissent dans la deuxième ville en importance en termes d’accueil de personnes immigrantes. Pour favoriser le vivre ensemble dans la diversité, Laval s’est dotée d’un cadre de référence.
Le Cadre de référence en immigration et diversité ethnoculturelle de Laval répond à une réalité chiffrée: les personnes immigrantes forment près du tiers de la population totale. La proportion grimpe à plus de la moitié, si on inclut les citoyens immigrants de deuxième génération.
Le document de 56 pages est le fruit de travaux — démarche participative ayant impliqué partenaires, employés de la Ville et citoyens — qui se sont échelonnés sur presque deux ans et s’inscrit dans la foulée de la Vision stratégique laval 2035: Urbaine de nature.
Y sont énoncés les valeurs et principes qui font l’unanimité, soit l’ouverture, le respect, l’inclusion, l’intégration, l’accessibilité, l’équité, l’identité plurielle et la diversité de Laval, l’approche citoyenne et la reconnaissance des besoins spécifiques des personnes immigrantes, notamment lors de la prestation de services municipaux. Pour passer aux choses concrètes, il faudra attendre la fin des travaux en cours, au printemps 2022.
Deux plans d’action
«La mise en œuvre du Cadre s’articulera à travers deux plans d’action distincts, soit un plan d’action régional en collaboration avec l’ensemble des partenaires et un plan d’action municipal pour la prestation de services municipaux», précise Arielle Grenier, conseillère aux affaires publiques de la Ville de Laval.
Le plan d’action municipal comprendra notamment la sensibilisation et la formation des employés des différents services municipaux, afin de s’assurer de répondre aux besoins spécifiques des membres des communautés ethnoculturelles.
Diagnostic
Dans le cadre des travaux préalables à l’élaboration du Cadre, la Ville a procédé à un examen de ses pratiques, pour dégager des priorités d’action.
Selon Bob White, professeur au département d’anthropologie à l’Université de Montréal et directeur du Laboratoire de recherche en relations interculturelles (LABRRI), l’exercice a été fait de façon rigoureuse. Le LABRRI a été mandaté par la Ville dans le cadre du processus d’élaboration du Cadre.
«Ils sont allés dans presque tous les services. Ils ont demandé: Voyez-vous sur le terrain des obstacles à l’accessibilité des services, des enjeux prioritaires? Beaucoup d’employés disaient souhaiter avoir un cadre de référence et étaient contents de voir que la Ville y travaillait. Ils étaient rassurés, car ils veulent avoir des outils et des consignes spécifiques, pour bien faire leur travail.»
Lors d’une activité de consultation, les employés participants ont formulé des objectifs, pour améliorer la prestation de services aux personnes immigrantes. La création d’une politique d’accès à l’emploi et la formation des employés en lien avec la réalité ethnoculturelle et les biais inconscients ont été notés.
On a également reconnu l’importance de la communication. Des employés ont suggéré de mettre sur pied un mécanisme en partenariat avec les organismes de la communauté, pour promouvoir les services de la Ville. On a également évoqué l’idée de répertorier les langues parlées dans les différents services municipaux et de créer un répertoire de ressources internes volontaires pour favoriser les échanges avec les citoyens.
Communiquer efficacement
Carole Charvet, directrice du Carrefour d’intercultures de Laval, souligne elle aussi le besoin d’informer efficacement et en continu les personnes immigrantes sur les ressources disponibles. Le Carrefour est un des organismes partenaires ayant participé aux consultations préalables à l’élaboration du Cadre. «La personne [qui vient d’arriver au pays] doit se faire de nouveaux repères, par exemple pour l’accès aux services de garde ou la recherche d’emploi…»
Communiquer clairement est un défi pour les organismes d’accueil et le contexte de la pandémie a accentué ce besoin, remarque Mme Charvet.
«Quand on veut faire passer un message, il faut que ce soit clair, pas trop compliqué, parce que la maîtrise de la langue n’est pas là. Il faut utiliser l’écriture simplifiée et honnêtement, c’est difficile.» C’est pourquoi son organisme, quand les circonstances le dictent, choisit de communiquer dans la langue d’origine de sa clientèle allophone. «Éventuellement, la langue de communication va changer, on va utiliser le français et on fait la promotion de la francisation.»
La question de la langue de communication revient dans plusieurs villes, note Bob White. Pendant la pandémie, Montréal a traduit ses consignes en plusieurs langues, illustre-t-il. Deux approches s’opposent, explique le chercheur.
«Il y a l’approche selon laquelle les villes sont des créatures du gouvernement et que les services se donnent en français [dans la province]. D’autres disent: Non, on a un problème d’accessibilité, de droit de la personne. C’est un enjeu délicat et important.»