« Bien que les jeunes femmes québécoises soient aujourd’hui plus nombreuses à décrocher un diplôme d’études postsecondaires que les hommes, elles demeurent toujours moins rémunérées qu’eux et ce, même lorsqu’on isole de nombreux facteurs qui contribuent aux inégalités sur le marché du travail », déclare Emna Braham, directrice adjointe de l’Institut du Québec par communiqué.
Ce constat est tiré d’une étude dévoilée par l’Institut du Québec et le FutureSkills Research Lab de l’Université de Toronto dans le cadre de l’Initiative de recherche sur l’éducation + les compétences.
Cette étude révèle que les écarts de revenus entre les hommes et les femmes qui ont un parcours similaire et qui travaillent à temps plein, s’élèvent en moyenne à 9 % et ce, dès la première année suivant l’obtention de leur diplôme postsecondaire (collégial ou universitaire). Cet écart se creuse dès les premières années de carrière et il grimpe à 16 % cinq ans après la diplomation.
Ce sont chez les diplômés les mieux payés, soit les 10 % dont les revenus sont les plus élevés, que les écarts entre les hommes et les femmes sont plus importants : 13 % un an après l’obtention du diplôme et 19 % cinq ans plus tard.
« Pour réaliser cette analyse, nous avons eu accès à des données inédites qui ont permis de suivre dans le temps l’évolution du parcours scolaire des diplômées et diplômés et de croiser ces informations à leurs revenus d’emploi, explique Annie Pan, coautrice de l’étude, par communiqué. Nous avons également pu isoler l’effet que certaines caractéristiques peuvent avoir sur le revenu tels que le niveau et le domaine d’études, le secteur d’activité ou encore la présence ou non d’enfant à charge dans le ménage ».
Plafond de verre
« Ainsi, contrairement à la croyance populaire, les femmes ne sont donc pas seulement confrontées au « plafond de verre » en milieu ou en fin de carrière pour accéder à des postes plus importants et mieux rémunérés, elles doivent composer avec ce vent contraire tout au long de leur parcours professionnel », soutient Emna Braham.
Le choix d’employeurs semble aussi jouer un rôle dans l’équation. Les femmes sont moins nombreuses à travailler pour des organisations qui paient bien et font souvent face à des pratiques d’entreprises qui ne favorisent pas le développement de carrière. Qu’elles aient ou non des enfants, l’anticipation d’éventuelles responsabilités familiales et la charge mentale semblent aussi intervenir dans les choix qu’elles font, notamment en privilégiant des employeurs et des secteurs d’activité qui favorisent une meilleure conciliation travail-famille.
Recommandations
Bien que les écarts de revenus entre les Québécoises et les Québécois se soient amoindris de manière importante entre les années 1960 et 2010, leur progression stagne depuis. Selon les autrices, ce plateau démontrent que les politiques mises en place pour les réduire les iniquités ne suffisent pas à corriger la situation.
Face à ces constats, les autrices formulent des recommandations pour améliorer la situation.
Un exemple d’actions que pourrait faire le gouvernement serait de modifier les politiques familiales pour viser un partage plus équitable des responsabilités familiales entre les hommes et les femmes comme offrir davantage de semaines de congé parental aux pères qui souhaitent consacrer plus de temps seuls avec leurs enfants. Selon les autrices, ce type de congé favoriserait le développement de leur sentiment de compétence envers l’enfant, une meilleure compréhension de la charge de travail et, à terme, un meilleur partage du travail domestique et familial.
Pour les entreprises, les autrices proposent de mettre en place des programmes d’accompagnement de carrière pour assurer une relève féminine dans les postes les plus élevés et les mieux rémunérés. (M.D.)