La démarche actuelle du Service de police de Laval (SPL) fait certes résonnance aux événements des dernières années reliés aux enjeux de profilage racial et brutalité policière en Amérique du Nord, dont la mort de George Floyd en mai 2020, étouffé au sol par un agent dans les rues de Minneapolis, aux États-Unis.
Des rapports et travaux sur le racisme et la discrimination systémique à Montréal et au Québec ont aussi pesé dans la balance dans ce qui a mené au programme Justice et équité, lancé le mercredi 22 mars.
«Je veux être clair et exprimer que je suis très fier du travail de nos policiers, déclare Pierre Brochet, chef de la police de Laval. Si on lance un plan qui dit non à la discrimination, on veut convaincre la population que la justice et l’équité dans nos interpellations, c’est essentiel.»
«C’est une responsabilité qu’on a d’aller de l’avant et ne pas lâcher pour faire en sorte que les gens aient la conviction que les policiers lavallois agissent de façon juste et équitable, et on va y parvenir»
– Pierre Brochet, chef de la police de Laval
Le principal élément décrié par les victimes de profilage racial demeure les interpellations aléatoires, quand le patrouilleur décide de son propre chef d’aller enquêter quelqu’un sur la rue et de lui demander son nom.
«Depuis quelques mois, on travaille avec le guide des pratiques policières de la Sécurité publique qui encadre ce type d’approche, souligne celui qui dirige le SPL depuis août 2013. Un policier qui interpelle un citoyen sur la rue doit détenir des informations du renseignement ou des observations pertinentes. Ce qui enlève la notion de feeling et représente déjà un changement important. Ça devrait enlever de la pression dans ce dossier.»
En complément, le SPL a aussi consulté les plaintes faites à la Commission des droits de la personne.
«Ce qui ressort beaucoup, c’est l’attitude, les petits commentaires, d’énumérer chef Brochet. On a un avocat à la Ville de Laval qui forme nos policiers sur ce qui cause un irritant pour le citoyen et l’amène à porter plainte.»
Pour améliorer la qualité des interventions, des formations auront aussi lieu sur le portrait multiculturel lavallois et mieux comprendre leur différence.
«Avec la croissance démographique à Laval, un phénomène qu’on va connaître encore de nombreuses années, certains quartiers accueillent presque 50% de citoyens venant d’une immigration de première ou deuxième génération, spécifie M. Brochet. Et c’est 30% pour l’ensemble de Laval.»
Fierté du travail
Dans le contexte actuel, marqué notamment par de nombreuses fusillades d’un bout à l’autre de l’île Jésus, Pierre Brochet rappelle que l’interpellation reste un mode d’intervention «extrêmement important» visant à prévenir tout crime.
«C’est un outil essentiel que l’on ne veut pas perdre, mais en l’utilisant de façon juste et équitable, nomme le directeur du SPL. En ce sens, les citoyens consultés nous ont dit que nous devrions expliquer plus le contexte de nos interventions et augmenter nos relations sociales.»
Spécifions qu’en 2021, sur les 43 armes à feu saisies à Laval, la moitié d’entre elles ont été sorties de la circulation par le biais d’interpellations de patrouilleurs sur la rue.
Recrutement
En ce moment, 8% des 620 policiers du SPL sont issus de minorités ethniques. Armé d’un programme de diversité culturelle du ministère de la Sécurité publique, Pierre Brochet a déjà fait sept promesses d’embauche à des personnes provenant d’un milieu ethnoculturel.
Le chef de la police lavalloise fait savoir qu’on peut ainsi lancer une invitation à des gens n’étudiant pas en techniques policière, mais possédant un diplôme en un autre domaine et ayant réussi un processus rigoureux de sélection.
Ces personnes peuvent ensuite profiter d’un cursus accéléré d’un an d’études collégiales. Elles poursuivront leur formation et devront réussir les différents tests à l’École nationale de police du Québec, à Nicolet.
«Nous avons déjà identifié sept autres personnes venant de minorités culturelles, note Pierre Brochet. Ça accélère le processus. Juste au cours de l’année qui vient, on pourrait ajouter un minimum de 14 policiers issus des minorités à notre effectif, sans compter l’embauche, fin mai, de près de 26 nouveaux agents, ce qui pourrait augmenter plus encore ce nombre.»
Cet ajout d’une vingtaine de policiers venant de communautés culturelles constituerait une belle avancée pour répondre à l’un des objectifs majeurs du nouveau programme: représenter davantage la population desservie par le SPL sur son territoire.