«C’est n’être bon à rien de n’être bon qu’à soi». Thomas Léro Tchassao avait fait sienne cette citation de Voltaire, sur son compte Facebook et dans sa vie. Le décès subit, le 22 juin, de M. Tchassao, gestionnaire du Centre local pour l’intégration et la cohésion sociale (CLICS Laval), afflige toute une communauté.
En entrevue le 9 juin avec le Courrier Laval, M. Tchassao avait présenté, avec l’aisance et la bonne humeur que ses amis et collègues lui reconnaissent, l’histoire et la mission du CLICS qu’il a fondé en 2015 à Vimont.
L’organisme offrant des services aux personnes immigrantes de Laval et des environs a surtout été associé à la crise des réfugiés syriens, à ses débuts. Cependant, la création du CLICS au moment de l’arrivée des Syriens en 2015 est «une pure coïncidence», avait noté M. Tchassao.
L’organisme, qui a apporté aide et soutien à ces réfugiés, répond aussi à des besoins plus larges avait-il expliqué. Les personnes provenant de l’immigration représentent «le tiers de la population de la Ville. Un seul organisme ne peut pas répondre à tous les besoins. Les organismes existants, comme l’Entraide Pont-Viau, desservent le sud-est de l’A-440 et le Carrefour d’intercultures de Laval, le sud-ouest. Le CLICS vient desservir Vimont, Auteuil, Fabreville, Sainte-Rose, au nord, en offrant des services de proximité».
Homme exceptionnel, réseau impressionnant
Thomas Léro Tchassao, 57 ans, originaire du Togo, était installé au Québec depuis plusieurs années. Affable, sociable, empathique et humble, il établissait facilement des liens avec les gens et multipliait les contacts dans la région et bien au-delà, témoignent ses proches.
«C’était un homme exceptionnel, à tous les points de vue, et c’est l’avis de tous», résume Latifa Mazhar, agente de développement au CLICS.
«C’est fou combien de gens il a impactés. Il a réussi à maintenir une relation privilégiée avec tout le monde.»
M. Tchassao lui-même parlait de la force du réseau pour venir en aide à la clientèle du CLICS, que ce soit pour de l’aide alimentaire, pour le transport à un rendez-vous médical, pour le soutien en lien avec le système scolaire ou tout autre besoin. «Prenez l’exemple de quelqu’un qui a besoin d’une table de travail pour ses enfants. Ce n’est pas possible pour tout le monde d’aller chez IKEA. Nous, on fait appel à la communauté, au réseau bénévole, à la participation citoyenne, pour répondre aux besoins», avait-il expliqué, en soulignant que les réseaux sociaux sont extrêmement efficaces, dans ces cas.
Radio ICIII Laval
Thomas Léro Tchassao aura eu le plaisir de voir la construction du nouveau studio de Radio ICIII Laval, une web radio inaugurée au printemps 2020. Le déménagement dans les nouveaux locaux de Pont-Viau était pour lui comme «un cadeau de Noël», témoigne Latifa Mazhar.
Très impliqué dans ce projet, M. Tchassao avait approché au début de l’année Dayila Sassy, jeune candidate du Parti Laval aux prochaines élections municipales, pour coanimer l’émission Bonjour Laval! aux côtés de Sarah Ouagueni. L’émission est diffusée deux fois par mois depuis avril. La prochaine édition, début juillet, sera un hommage à M. Tchassao, prévoit Mme Sassy. «Je ne me vois pas faire autre chose.»
Mme Sassy, qui connaissait le fondateur du CLICS depuis quelques mois seulement, avait déjà reçu l’engagement de ce dernier pour l’aider dans sa campagne électorale. «Il m’avait dit qu’il ferait du porte-à-porte, il avait déjà rempli son formulaire de bénévole. C’était quelqu’un qui aimait les gens sans demander rien en retour.»
«Il était toujours disponible, même si son téléphone sonnait tout le temps.»
Un grand homme
Cette semaine, c’est le téléphone des employés et administrateurs du CLICS qui sonne sans arrêt depuis que la terrible nouvelle s’est répandue.
«C’est quelqu’un de déterminé, qui n’a pas froid aux yeux, qui dit ce qu’il pense», dit le président du CLICS, Okey Ogbonin Attivi, en parlant de son collègue et ami au présent, le lendemain de son décès inattendu. «Pour moi, c’est comme un mentor, un motivateur, il t’écoute, il te donne toujours une solution, pour tout ce que tu veux entreprendre. C’est ça, M. Tchassao.»
Les deux hommes originaires du Togo se parlaient plusieurs fois par jours. «C’est comme une moitié de moi qui est partie. C’est un grand homme qui est parti.»