La Ville met un terme à la chasse aux millions entrepris il y a 10 ans dans l’espoir de récupérer une partie des fonds détournés sous le règne du maire déchu Gilles Vaillancourt.
«Aujourd’hui, nous pouvons tourner la page sur un moment sombre de notre histoire et regarder avec confiance vers l’avenir», a déclaré le maire Stéphane Boyer lors d’un point de presse tenu à l’hôtel de ville le 20 février.
60 M$ récupérés
Désormais dissoute, l’équipe de huit enquêteurs et juristes formée en 2016 a déposé un bilan qui demeure toutefois provisoire, considérant les cinq poursuites toujours pendantes devant les tribunaux.
Or, des 60 millions de dollars récupérés à ce jour, 25 M$ l’ont été dans le cadre du Programme de remboursement volontaire (PRV) de la Loi visant principalement la récupération de sommes payées injustement à la suite de fraudes ou de manœuvres dolosives dans le cadre de contrats publics.
Ce programme, qui assurait l’anonymat des corrupteurs repentis, a mené à des règlements avec 17 entreprises qui furent parmi les plus actives dans l’un des pires réseaux de corruption municipale jamais mis au jour au pays.
Depuis l’expiration du PRV, à la mi-décembre 2017, la Ville a engagé pas moins de 18 procédures civiles contre 47 personnes et 22 entreprises soupçonnées d’avoir profité des largesses de l’ancienne administration corrompue.
La Ville a ainsi pu récupérer 35 M$ au terme de 13 de ces poursuites dont 12 ont été réglées hors cour.
«Nous avons récupéré l’argent volé aux citoyen(ne) et, surtout, nous avons envoyé le message clair que des conséquences attendent ceux et celles qui ne respectent pas nos lois», a rappelé Stéphane Boyer.
20 autres millions espérés
Quant aux 5 poursuites civiles en cours, les sommes réclamées par la Ville totalisent un peu plus de 20 M$.
«On lâchera pas tant et aussi longtemps que ces cinq dossiers ne seront pas réglés», a affirmé Me Simon Tremblay, directeur du Service des affaires juridiques à Laval.
Un de ces dossiers vise six anciens complices de Gilles Vaillancourt, poursuivis solidairement pour six millions de dollars au civil. Il s’agit de l’ex-avocat et homme de confiance de M. Vaillancourt Pierre L. Lambert, l’ex-avocat de la famille Vaillancourt Me Robert Talbot, l’ex-notaire et collecteur de fonds Jean Gauthier, l’ex-avocat et agent officiel du défunt parti PRO des Lavallois – Équipe Gilles Vaillancourt, Jean Bertrand, du frère de l’ancien maire, l’homme d’affaires Guy Vaillancourt, et de l’ex-directeur du Service de l’ingénierie Claude de Guise.
Complètent le tableau les entreprises J. Dufresne Asphalte, Construction Soter, BPR Triax et Nepcon, qui ont obtenu des contrats publics à Laval entre 1996 et 2010.
Les 14 millions qu’on leur réclame correspondraient à 20 % de la valeur totale de ces contrats, conformément à la présomption établie en matière de surfacturation dans le cadre de truquage d’appel d’offres public.
Au-delà des cartels
Au cours des dernières années, l’équipe d’enquêteurs a scruté les contrats et mandats municipaux accordés à l’ensemble des fournisseurs de biens et services couvrant la période 1996-2010.
En plus des cartels d’entrepreneurs et d’ingénieurs qui, pendant au moins 15 ans, se sont partagés à l’abri de toute concurrence d’importants contrats publics, on apprenait l’année dernière que trois firmes d’architectes-paysagistes avaient tiré profit de ce système collusionnaire entre 2004 et 2010. Les poursuites en lien avec ce réseau de partage de contrats ont depuis été réglées à la satisfaction de la Ville.
Y a-t-il d’autres secteurs d’activité qui ont profité de ce stratagème ?
«On a enquêté tous les domaines possibles, mais encore une fois la collusion c’est difficile à prouver», explique Me Tremblay. Une firme de consultant en informatique et deux entreprises immobilières impliquées dans des transferts de terrains complètent le tableau de chasse municipal. (Autre texte à venir)